Au cours de notre périple, nous avons utilisé de nombreux moyens de transports : cargo, ferry, bac, voilier, cheval, buggy, hydroglisseur, « pompes »... mais jusqu’à présent, nous n’avons pas testé le VTT. Alors puisque nous sommes à La Paz, capitale de la Bolivie, pourquoi ne pas envisager la descente de la célèbre « ROUTE DE LA MORT » qui a la réputation d’être la route la plus dangereuse du monde ! On peut toutefois la dévaler à vélo en toute sécurité, du moins, en demeurant extrêmement prudent.
22 et 23 novembre 2018. En route pour La Paz
Tchao Copacabana, en route pour la capitale.
Après avoir longé le « Titicaca » pendant plusieurs dizaines de kilomètres...
...
la route s’interrompt brutalement. Des bacs sont alignés sur le lac. Sitôt arrivés, sitôt repartis ! Chouchou cohabite avec un camion et nous, avec deux petites dames qui vont au village...
Notre entrée dans La Paz s’avère assez problématique. Nous arrivons par El Alto (4 000 m), les quartiers « défavorisés » de la capitale. Maps.me et Google Maps nous font passer en plein milieu d’un marché... disons populaire, qui grouille de monde. Verrouillage obligatoire des portières par précaution. Pourvu qu’un « obstacle », un rétrécissement ou autre ne nous empêche pas de progresser ! De toute façon, nous n’avons pas le choix ! Chouchou est obligé de slalomer entre les parasols des vendeurs ambulants pendant de longues minutes qui nous paraissent une éternité.
En jouant des ailes et des bumperettes, nous parvenons enfin à nous s’extraire du « gourbi ».
Un peu d’air frais... sans trop d’oxygène toutefois !
Nous nous mettons en quête d’un petit hôtel proche du centre qui possède un parking sécurisé. Il est hors de question d’abandonner Chouchou seul et n’importe où durant la nuit ! Après maintes tentatives infructueuses, nous découvrons THE pépite : le Tinka Hostal.
On va pouvoir préparer l’itinéraire pour la prochaine semaine, mettre le blog à jour, faire quelques achats et prospecter pour trouver une agence sérieuse pour notre « ballade de santé ».
La Paz n’est pas un chef d’oeuvre d’architecture, c’est le moins que l’on puisse dire. Pourtant la rue Sagarnaga bordée de boutiques d’artisanat et la rue des sorcières 🧙♀️ et ses boutiques qui vendent des fœtus de lamas séchés méritent un petit détour.
Voir ces petits animaux se balancer au bout d’une corde dans ces micro-boutiques tient plutôt du film d’horreur ! Dans la culture Aymara, ce sont des porte-bonheurs que les indiens enterrent sur leurs terres pour se garantir non seulement la fortune 💰 mais également la protection de la Pachamama, la déesse-mère !
Préparation de notre trip du lendemain...
Brrr ! Le seul fait de penser à cette route me fait frissonner ! C’est à la fois excitant et terriblement angoissant d’envisager de parcourir l’une des routes considérées comme étant la plus vertigineuse de Bolivie et qui a été élue route la plus dangereuse du monde en 1995. Les reportages sur cette piste qui serpente à flanc de montagnes sont nombreux. L’affronter avec Chouchou ? Perso, après notre expérience péruvienne, je n’en ai pas trop envie… D’autant plus que nous arrivons en période de pluie ! En revanche avec un bon VTT, no souci ! Éric est partant !
Mais en réalité, on connaît déjà cette route pour l’avoir descendue lors de notre premier séjour dans le pays en 2002 !
Alors, qu’en est-il aujourd’hui ?
Nous recherchons une compagnie sérieuse.
En effet, certaines agences peu scrupuleuses louent des vélos avec des freins défectueux et des personnels encadrants peu voire pas qualifiés...
Vu que l’on ne badine pas avec « El Camino de la Muerte », notre choix se porte sur l’agence « Gravity » gérée par un Néozélandais qui semble être la meilleure et bien sûr, la plus chère !
RDV est pris pour le lendemain 7 heures 30 dans un bar de La Paz situé à deux kilomètres de notre hôtel...
24 novembre 2018. En route pour l’aventure
Construite pour relier la ville de La Paz au village andin de Coroïco, cette route des Yungas, son autre nom, a été creusée à même les falaises par des prisonniers du Paraguay capturés lors de la guerre du Chaco qui a opposé ce pays à la Bolivie de 1932 à 1935. « Ceux qui tentaient de s’échapper étaient jetés du haut du balconcillo, un promontoire donnant sur un précipice, et ceux qui s’en sortaient par la suite étaient éliminés par des tireurs d’élite ».
Mais ce n’est pas de là que la ROUTE DE LA MORT tient son nom.
Une fois parachevée, cette route a en effet vu se multiplier les accidents mortels de véhicules et camions lourds, autobus bondés compris. « On compte les morts par milliers depuis son inauguration ». Il fut un temps où jusqu’à 300 personnes y perdaient la vie chaque année.
Outre le brouillard ou la poussière soulevée par les véhicules qui obstruaient tous deux la vue, c’est quand les conducteurs tombaient nez à nez que le pire arrivait, la route n’étant généralement pas assez large pour leur permettre de se croiser.
Après une nuit peuplée de rêves étranges, nous rejoignons le lieu de RDV. Notre groupe est constitué de huit personnes âgées de 25 à 68 ans et de toutes nationalités (français, indiens et suisses). Nos deux guides (Gustavo et Fernanda) nous accompagneront au cours de l’épopée.
45 minutes de minibus (lequel nous suivra tour au long du périple) et nous voici parvenus à la Cumbre (le col), lieu de départ de « l’aventure ».
Les VTT sont descendus du minibus. Il s’agit d’engins de marque Kona réputés pour leur fiabilité et leur technicité. Ils sont équipés de freins à disques.
On écoute attentivement les instructions du maestro : freinage, le plus important, un doigt sur le frein avant, deux doigts sur celui de l’arrière (je me le répèterai en boucle tout au long des 62 kilomètres de descente), courbe, croisement de camions...
Le rituel pour le fun : nos vélos sont aspergés d’un liquide translucide. Tour à tour, chacun boit une gorgée de ce qui s’avère être de l’alcool, à même une fiole qui passe de bouche en bouche. On demande à la Pachamama de bénir notre descente... Nous sommes immédiatement dans l’ambiance !
On enfourche nos bécanes, et c’est parti pour trois à quatre heures de folle descente.
Il fait froid, très froid ! Quoi de plus normal à 4 750 m d’altitude, d’autant que la pluie s’est invitée très rapidement dès notre sortie de La Paz.
En petite mise en bouche, nous devons parcourir une quinzaine de kilomètres de route avant d’attaquer les choses sérieuses.
Les doigts sont gelés, le nez rougi par le vent et le froid. Le corps est transi. La pluie qui nous fouette le visage et le brouillard nous empêchent de voir la route asphaltée qui se déroule devant nous. Avec des lunettes, tu n'y vois rien, sans les lunettes, eh bien... tu n’y vois rien non plus ! La circulation est dense et la vigilance s’impose.
P...., on a choisi notre jour ! Si ça continue, on va aborder la piste dans une sacrée purée de pois... Tout ceci n’est pas pour me rassurer !
Très rapidement on se retrouve à l’intersection qui marque le début de la « ROUTE DE LA MORT ».
On est trempé jusqu’aux os. On tremble... de froid ou de peur ! Eric, c’est de froid.... Me concernant de froid certes, mais je dois bien l'avouer, j’ai aussi un peu la trouille !
Nouveau briefing, plus précis celui-là. Gustavo nous informe que tous les cinq kilomètres, on fera une pause. Il nous fera part des difficultés à venir et de « comment aborder certaines sections »...
En principe, aucun véhicule n'arrivera en sens inverse, une nouvelle route asphaltée ayant été créée pour éviter les accidents (il y a quinze ans, nous avions croisé de nombreux véhicules, camions, et il est vrai que la situation s’avérait parfois problématique). Si on entend un coup de sifflet, cela signifie : véhicule qui monte... Si trois coups de sifflet, c’est un camion...
Il nous faut non seulement ouvrir grands les 👀 mais aussi grandes les 👂!
Gustavo n’hésite pas à nous parler des faits dramatiques qui se sont produits sur cette route afin d’attirer notre attention et de forcer notre concentration du début à la fin des 62 kilomètres de descente...
A tel endroit, un cycliste a fait une chute mortelle car... il n’avait pas vu que la route se rétrécissait... A un autre, un camion transportant du riz avec six personnes sur le toit a chuté dans le vide... A un autre... La profondeur des à-pics est connue grâce aux cordes qui ont servi à remonter les corps... Alors là, on peut dire que « t’es » tout de suite dans l’ambiance...
Vous reprendrez bien un peu de « pression » !
Gustavo nous rassure en nous disant que si des cyclistes meurent ici, nous c’est soit par distraction, soit parce qu’ils sont trop confiants, soit encore parce qu’ils roulent comme des kamikazes dévalant la route à... tombeau ouvert.
Forts de toutes ces informations... c’est parti sur cette looooongue piste accrochée à flanc de montagne qui serpente jusqu’à 800 m au-dessus du vide. Pas d’asphalte ou de béton, que de la terre, de la pierraille et des nids-de-poule sur à peine trois mètres de largeur... en général.
Aucune distraction, aucune confiance et très peu d’esprit kamikaze, ça devrait le faire !
La vue est splendide, on voit le tracé sur des centaines de mètres en contrebas, au bord du vide. Splendide mais impressionnante. On se lance, prudemment, d’autant que la pluie redouble d’intensité. Passer sous les chutes d’eau qui dégringolent des parois verticales, traverser des cours d’eau ne nous posent aucun problème vu que nous sommes déjà trempés jusqu’aux os...
En fait, la piste n’est pas technique, même pour les néophytes que nous sommes, mais il faut garder 100% de maîtrise pour éviter la chute qui pourrait être dramatique et pourrait compromettre définitivement… notre voyage... Je préfère, pour ma part, me rapprocher de la paroi que du vide... LOL !
Les pauses « snacks » et mises en garde se succèdent.
Quatre heures après, on arrive à destination à 1 200 mètres d’altitude. Une bonne douche, un bon repas et on reprend le minibus. Nous délaissons la « ROUTE DE LA MORT » pour emprunter la route asphaltée qui rejoint La Paz en fin de soirée...
Infos rando
65 kilomètres de VTT
4 heures
3 500 m de dénivelé négatif...
95% de descente…
Une énorme ampoule au pouce droit à force de freiner !
Au final, la piste est beaucoup moins périlleuse que lorsque nous l’avions empruntée seize ans auparavant pour deux raisons.
Aucun risque de croiser d’autres véhicules ou pire des camions.
Quelques barrières de sécurité ont été depuis mises en place dans les endroits les plus dangereux...
Chouchou aurait pu emprunter cette piste... qui nous semble au demeurant beaucoup moins problématique que celles du Pérou et de la Cordillère Blanche en particulier !
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